La haie fruitière Bouché-Thomas

Remarque préliminaire de Bébert : cette publication s'adresse à des enfants du primaire, elle détaille fortement tous les processus de mise en place de la haie. J'ai également refais les dessins de Pierre Bernardin en vectoriel.

Cuve.

Photo Bouché-Thomas

Grâce aux B.T. : « Le petit arboriculteur » (n° 175 et n° 484), tu as obtenu des beaux scions d'un an dont la hauteur approche souvent de deux mètres. (Si tu n'en as pas, tu peux en acheter : ce n'est pas très cher).

Il faut les mettre en place définitivement. Comme il te tarde d'avoir des fruits, tu vas planter tes scions de pommier et de poirier en haie fruitière Bouché-Thomas.

Dans cette méthode, on plante, inclinés, des scions d'un an (ils font un angle de 30° avec l'horizontale).

On aligne les scions suivant la vigueur de la variété, à :

La distance entre les rangs sera de 2,50 m pour les poiriers ; 3,50 m à 4 m pour les pommiers.

plan1.

Plus tard, on utilise les rameaux vigoureux (gourmands) qui poussent naturellement au bas des Scions (en pointillés, figure ci-dessus) pour garnir la haie, en les inclinant à 30° quand ils ont une longueur de 1 m à 1,50 m .

plan1.

Par la suite, on incline les autres rameaux à 30° en laissant entre chacun d'eux une distance de 0,30 m environ. Les rameaux en surnombre sont supprimés et on obtient ainsi une haie continue.

plan1.

Préparation du sol (bêchage)

Fin août ou courant septembre tu vas bêcher le sol dans lequel tu veux planter tes scions.

Il faudra défoncer ton terrain sur 1,50 m de largeur environ (0,75 m de chaque côté de la ligne sur laquelle tu veux planter tes arbres) et sur une longueur égale à celle de ta plantation augmentée d'un mètre à chaque extrémité.

plan1.

Soit ABCD ta parcelle de terrain à défoncer pour une ligne d'arbres AD 1,50 m; BC — 1,50 m.

Tu veux planter tes arbres sur la ligne EF. Avec une bêche, tu vas d'abord travailler la plate-bande FCDE en reculant de FC vers ED, puis la plate-bande AEFB en reculant de AE vers BF.

Défonce ton sol jusqu'à 40 cm de profondeur.

Cuve.

Cinquième année de production. Photo Bouché-Thomas.

Préparation des trous pour la plantation

Je suppose que tu aies dix pommiers d'une variété moyennement vigoureuse et que tu veuilles les planter sur un rang à 3 m les uns des autres.

Tu as défoncé une bande de terrain ABCD de 1,50 m de largeur sur (3 m x 9) + 2 m = 29 m de longueur.

Cuve.

Pierre enfonce un piquet.

Tu plantes les deux extrémités de ton cordeau en E et F, milieux de AD et BC. Tu vas planter une rangée de piquets le long de ton cordeau et de telle manière que le premier soit à 1 m de E, le second à 3 m du premier, le troisième à 3 m du deuxième et ainsi de suite jusqu'au dixième qui sera à 1 m de F.

Enlève ton cordeau.

Cuve.

À gauche du 1er piquet, tu vas creuser un trou carré de 40 cm sur 40 cm et 30 cm de profondeur.

Cuve.

À droite du 2e piquet, tu vas creuser semblable au 1er ; un 3e à gauche du 3e piquet ; un 4e à droite du 4e piquet et ainsi de suite jusqu'au dernier.

Cuve.

Fais bien attention à l'emplacement des trous par rapport aux piquets (tantôt à droite, tantôt à gauche du piquet).

Arrachage et habillage

Par un beau jour de février ou de la première quinzaine de mars, tu vas planter tes arbres.

Avant de commencer ton travail, rends-toi compte de l'humidité de la terre: il ne faut pas planter dans la boue ni même dans une terre trop humide qui formerait pâte en la remuant et en la tassant.

Cuve.

Irène choisit un beau scion d'un an.

Tu choisis les plus beaux scions d'un an (deux mètres de long-environ).

Les autres, garde-les en pépinière pour l'an prochain.

Cuve.

Pierre arrache un scion.

Tu arraches délicatement ton scion en soulevant la terre tout autour, à 40 cm du pied, au moyen d'une bêche et en tirant sur l'arbre que tu saisiras en dessous du point de greffe ; si c'est nécessaire, déchausse- le bien pour ne pas abîmer les racines.

Avec une serpette, coupe ensuite les parties de racines blessées par l'arrachage et l'extrémité des racines saines.

Avant d'arracher tes arbres, tu auras eu soin de préparer le mélange suivant dans une comporte :

Cuve.

Pierre praline un scion.

Au moment de planter, trempe les racines de l'arbre dans ce mélange. L'arbre est praliné[1].

Cette opération est très importante, car elle te permettra de réussir toutes tes plantations.

Le gabarit

Pendant les jours de pluie de l'hiver, tu as fabriqué un gabarit de la forme ci-dessous avec quelques morceaux de liteaux (planchettes de 4 à 6 cm de large et 1 cm d'épaisseur).

Ces dimensions : 1 m et 0,58 m sont calculées pour que l'angle en A ait 30°. (Un angle de 30° est le 1/3 d'un angle droit, ou la moitié d'un angle d'un triangle équilatéral).

Cuve.

Voici le gabarit que tu doit faire.

ATTENTION! Quand tu utiliseras ton gabarit pour la plantation, il devra toujours être du côté du piquet par rapport au trou (Vois fig. 2, page 5 et fig. 1 page 9) et son angle aigu de 30° devra affleurer le bord du trou, à côté du piquet.

La mise en terre

Place l'extrémité À de ton gabarit au bord du trou (figure ci-dessous) et enfonce le piquet B en terre de telle sorte que le côté BC soit vertical et que le côté AB suive la direction du rang de la plantation.

Cuve.

Sur AC, pose ton scion comme l'indique la figure 1, de manière que toutes les racines soient dans le trou et que le point de greffe soit en dessous du niveau du sol (2 cm en terrain lourd, argileux, 6 cm en terrain léger, sablonneux).

Cuve.

Attache le scion au gabarit en D et E au moyen de fil souple, genre fil électrique conducteur, ou de fil spécial Bouché-Thomas.

Termine ta plantation

Il ne reste plus qu'à recouvrir les racines de terre. Sers- toi d'une pelle pour lancer de la terre bien meuble et bien fine sur les racines et de temps en temps secoue l'arbre pour que la terre glisse entre les racines et ne laisse aucun vide.

Cuve.

Pierre recouvre de terre les racines de l'arbre.

Si les racines dépassaient du trou, avec ta main gauche, abaisse-les, pendant que ta main droite vide la pelletée de terre dessus.

Quand le trou est rempli et que la terre forme même un petit monticule, tasse-la en la trépignant.

Ton arbre est planté. Tu peux enlever les attaches D et E (figure précédente) et le gabarit qui vont te servir pour continuer ta plantation.

Lorsque le second scion est planté, attache-le avec le premier au point de croisement, si la longueur des scions le permet.

La toilette du scion

Si ton scion était dégarnis de branches, c'est fini. Si au contraire, il présentait un certain nombre de ramifications comme ci-dessous, il vaudra mieux en supprimer quelques-unes pour ne garder que celles qui te permettront de constituer la future charpente.

Cuve.

Ainsi tu supprimes tous les rameaux latéraux ou en dessous pour ne conserver que les rameaux verticaux distants de plus de 30 cm. (Voir explications de la page 14).

Cuve.

Le gourmand de base

Je suis sûr que tu seras curieux de voir comment la végétation démarre au mois de mars, avril et mai.

Les yeux se gonflent, éclatent, de petites touffes de feuil- les s'étalent, des rameaux s'allongent timidement.

Il s'agit maintenant d'avoir une pousse vigoureuse à la base de l'arbre et une autre à l'extrémité.

Lorsque les yeux de la base se seront développés (ce ne sera pas nécessairement l'année de la plantation), choisis le mieux placé sur le dessus de ton scion pour le conserver, supprime tous les autres entre lui et le sol et au-dessus de lui sur une longueur de 20 cm. (Autrement dit, supprime tous les bourgeons, sauf À entre B et C.)

Le bourgeon A donnera un rameau vigoureux que nous appelons le gourmand de base.

Cuve.

Le gourmand de l'extrémité

À l'extrémité de ton arbre, en A, tu vas voir se développer l'œil terminal et peut-être plusieurs autres yeux autour de la branche. Si ces yeux latéraux commencent à s'allonger pour donner des rameaux, il ne faudra laisser que celui de l'extrémité et supprimer tous les autres sur une longueur de 10 cm. (Soit supprimer tous les bourgeons entre C et D).

ATTENTION ! Ce que je viens de t'expliquer peut se produire l'année de la plantation ou attendre un an de plus. Tu interviendras lorsque ce sera le moment.

Cuve.

Cuve.

Pousses intermédiaires

Entre la base et l'extrémité que tu as ainsi ébourgeonnées, les yeux vont te donner :

Cuve.

Tu pourras garder les rameaux verticaux s'ils sont espacés d'au moins 30 cm. S'ils sont plus près, tu supprimeras ceux qui paraissent être en surnombre en les coupant avec tes doigts alors qu'ils sont encore jeunes ou sur empattement avec le sécateur, si tu as trop attendu[2]

Mais ATTENTION ! ici la plus grande partie de l'empattement doit rester sur l'arbre.

Dans tous les cas, tu supprimeras, pour le moment, les rameaux latéraux (obliques ou horizontaux).

Rameaux verticaux

Lorsque tes rameaux verticaux seront assez longs (1 m à 1,50 m) tu commenceras à les incliner en les attachant, soit à un piquet ou un « cavalier », si c'est le gourmand du bas, soit à une autre branche, si c'est le gourmand intermédiaire,

Ne cherche pas à les incliner à 30° en une seule fois : tu risquerais de les casser, et surtout, la sève risquerait de se porter sur d'autres bourgeons prêts à donner du fruit et les ferait s'emporter à bois[3], te donnant une grande quantité de rameaux dont tu serais embarrassé.

Tu continueras à les incliner lorsqu'ils auront augmenté de longueur.

Cuve.

Voici comment incliner et attacher tes rameaux verticaux.

Fabrique des crochets …

Monsieur Bouché-Thomas préconise, pour les vergers de rapport, un fil souple attaché au scion voisin ou un crochet de châtaignier[4] enfoncé en terre.

Mais pour toi qui as un petit nombre d'arbres, je te conseille de préparer des crochets comme celui-ci.

Cuve.

Cuve.

Abaissement des gourmand avec un crochet de bois.

… pour attacher les gourmands

Pour cela, tu achètes chez un marchand de fer du rondin de 5 mm de diamètre dont les maçons se servent pour ferrailler le ciment armé et tu le fais couper en baguettes de 15 cm de long. Tu te fais donner un morceau de tube de 20 cm de long et 6 mm de diamètre intérieur.

Dans un établi, tu enfonces de 2 à 3 cm, trois grosses pointes ABC de 5,8 mm de diamètre disposées comme l'indique la figure ci-dessous.

Tu introduis la baguette de 15 cm dans le tube et tu la laisses dépasser de 3 ou 4 cm pour en placer l'extrémité entre les pointes A et B de ton établi. Tu tournes autour de B pour faire la petite boucle du crochet. Si tu ne peux pas la fermer complètement à l'établi, tu finis avec un marteau. Tu enfiles ensuite la pointe C avec la boucle D, tu tiens 3 ou 4 cm de l'autre extrémité avec le tube et tu tournes autour des pointes A et B pour faire la grande boucle E du crochet.

Tu peux aussi préparer des rectangles de caoutchouc de 8 cm x 5 cm découpés dans des pneus d'auto au moyen d'un vieux sécateur.

Cuve.

Cuve.

Abaissement des gourmands avec un crochet de bois.

Attache les gourmands

Tu plantes un « cavalier » de 30 cm de long à 50 cm environ du pied de l'arbre et dans l'alignement de la plantation.

Tu peux fabriquer ce « cavalier » du rondin de 1 de diamètre et 60 cm de long courbé en son milieu (ci-dessous). Le « cavalier » doit être complètement enfoncé dans le sol.

Cuve.

Tu attaches un fil de fer n° 11 à ton « cavalier » et tu le coupes à une longueur de 60 cm environ.

Tu places un morceau de caoutchouc contre le gourmand et tu embrasses le tout avec la grande boucle de ton crochet.

Tu introduis l'extrémité libre du fil de fer dans la petite boucle du crochet.

Avec ta main gauche qui maintient en place le crochet et le morceau de pneu contre le rameau, tu inclines celui-ci un peu plus bas que la position désirée pendant que la main droite tire sur le fil et l'enroule autour de lui-même.

Incliner n'est pas arquer

Ne mets pas ton crochet trop haut sur le gourmand ; tu risquerais d'arquer ton rameau au lieu de l'incliner.

Tu courrais ainsi le risque de voir l'extrémité de ton rameau dépérir tandis que les yeux de la base se développeraient violemment à bois

Cuve.

Fais ceci.

Cuve.

Et non cela.

Les rameaux intermédiaires

Tu agis de même avec les rameaux intermédiaires au fur et à mesure de leur allongement.

Tu commences à les incliner légèrement dès qu'ils ont 1 m, pour les amener à faire un angle de 30° avec l'horizontale lorsqu'ils ont 2,50 m ou plus.

Cuve.

Sois bien pénétré de ces idées :

Chaque fois qu'un œil se développe à bois et qu'il risque de donner un fort rameau trop près des autres, supprime-le avant qu'il ait eu le temps de gaspiller beaucoup de sève.

À partir du moment où tes branches de charpente : gourmand de la base et pousses intermédiaires verticales sont assez développées ( tu as commencé à les incliner), tu peux laisser pousser quelques rameaux latéraux (de chaque côté de ta haie) pour donner un peu de ventre à celle-ci, accroître la longueur de la charpente et augmenter ainsi la quantité des fruits.

Lorsque ces rameaux latéraux deviennent trop longs et risquent de gêner le passage entre les rangs, tu les inclines dans le sens du rang, parallèlement aux branches principales.

Cuve.

Irène et Pierre se sont donnés la main à travers la haie, pour l'en montrer l'épaisseur.

Attention aux étranglements !

Surveille les ligatures !

Attache aux croisement !

Cuve.

Irène a laissé étrangler la branche par un lien trop serré.

Quand tu visites ton verger, desserre les ligatures qui risquent de blesser les branches par étranglement.

Chaque fois que tu constates que deux branches sont assez longues et assez inclinées pour se croiser, attache-les au point de croisement pour rendre solide la charpente et profi- Pierre apporte une fourchée tes-en pour récupérer les crochets et les fils de fer devenus d'herbe sèche sur le pied d'un | inutiles ou peut-être dangereux.

Entretien du sol

Pendant les premières années, tu peux bêcher superficiellement le sol autour des racines de tes arbres et mettre un peu de paille ou d'herbe sur ce sol pour combattre la sécheresse et laisser suffisamment d'humidité aux jeunes racines.

Par la suite, lorsque tes arbres se seront affranchis (les } greffons auront émis des racines qui le nourriront directement) rl et seront devenus très vigoureux, tu pourras laisser pousser l'herbe autour de tes arbres : il te suffira de la faucher de temps en temps et de la laisser pourrir au-dessus des racines.

Cette couverture[5] entretiendra l'humidité et la vie au contact du système nourricier de tes plantes.

Cuve.

Pierre apporte une fourchée d'herbe sèche sur le pied d'un arbre.

Monsieur Bouché-Thomas te parle :

Je ne suis pas un écrivain de métier, mais un simple praticien qui, depuis fort longtemps a écouté la grande plainte des arbres fruitiers, torturés et doublement tondu chaque année.

Devant ces massacres qui se renouvellent depuis des siècles, j'ai pendant 30 ans observé, comparé, réfléchi, cherché, vérifié :

L'arbre est une merveille pourquoi le mutiler ?

Si je te présente aujourd'hui ma méthode : « Le Bouché- Thomas », c'est que j'ai la ferme conviction qu'elle représente un grand progrès par rapport aux méthodes traditionnelles de conduite des arbres fruitiers.

À l'encontre des livres techniques, mon ouvrage s'adresse à tous : aux savants et aux théoriciens ; aux cultivateurs qui doivent produire vite des fruits de qualité ; à l'amateur qui veut tirer le meilleur profit de son petit coin de terre, voire de son espalier.

Si ton papa s'intéresse aux arbres et désire planter un verger, je crois que mon ouvrage lui rendra de grands services.


[1] Pourquoi pratique-t-on le pralinage ? Pour donner aux jeunes racines, pendant les premiers jours après la transplantation, l'eau nécessaire à la reprise (cette eau est retenue par l'argile) et un aliment de choix (la bouse de vache) qui lui permettra d'attendre la nourriture puisée par les futures radicelles. Situ n' pas à te procurer de la bouse de vache, tu peux à la rigueur, ne mettre que de l'argile et de l'eau.

[2] L'empattement est la base ridée et élargie par laquelle un rameau s'attache sur une branche plus grosse. Taille dans la partie ridée.

[3] Devenir très vigoureux et donner un rameau, là où il se formait un bourgeon à fleurs.

[4] Réf. «La méthode Bouché-Thomas» page 101.

[5] Néanmoins, si la région est infestée de mulots, cette tique excellente est à car ce paillis sert de refuge aux rongeurs qui s'attaquent aux racines.

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Bouché-Thomas

Fleuron