Les haricots
Phaseolus vulgaris

Fleuron

L'école du jardin potager, par De Combles, né à Lyon, à vécu à Naples, mort en 1770. 6e édition réalisé par Louis du Bois en 1822, 1ere édition 1752

Le nom de haricot est commun à la plante et au fruit qu'elle produit : pour distinguer cependant la gousse qu'on mange en vert, d'avec le grain lorsqu'il est séparé de sa gousse, on dit haricot vert et haricot blanc ; et lorsque le grain est sec, on dit haricot sec ou fève de haricot.

Cette plante est universellement connue, et il s'en fait une grande consommation en tout pays. Quelques espèces filent, c'est-à-dire, montent ; les autres demeurent basses, d'où on les appelle haricots nains. La feuille est uniforme dans toutes les espèces de ce pays ; elle est disposée comme celle du lierre, je veux dire, divisée en trois parties presque égales qui naissent ensemble sur la même queue, toutes trois terminées en pointe, d'un beau vert de pré, lisses, minces et unies sur les bords. Ses fleurs sont sans nulle odeur, petites, d'une forme irrégulière ; blanches ou purpurines, suivant l'espèce, et sortent des aisselles des feuilles par bouquets de quatre, six, huit ou dix, placées de deux en deux par échelons le long du rameau où elles tiennent. La tige est extrêmement déliée, et ne se soutient qu'en s'accrochant aux tiges voisines, au défaut d'autre appui.

À la fleur succède la gousse, qui est plus ou moins longue, suivant l'espèce, et large d'un travers de doigt ; elle renferme les grains au nombre de cinq ou six, plus ou moins, qui se détachent aisément lorsqu'elle est sèche.

Ce légume est employé si fréquemment dans la cuisine, qu'on peut dire qu'il est le plus assidu au foyer. Il est de toutes les saisons, de toutes les conditions, et du goût des plus délicats : il se mange en gras comme en maigre, et en beaucoup de façons. En vert avec sa gousse, on l'accommode au jus, au beurre, et à la crème ; mais il faut lui ôter exactement ses filets et les deux extrémités ; en grains tendres, on lui donne les mêmes apprêts ; sous les viandes rôties il est particulièrement bon. Sec, on le fricasse de plusieurs manières: on le mange en salade : on en fait des purées. Lorsqu'il est confit, il tient parfaitement sa place dans les entremets, soit au jus, soit à la crème ; et, quoiqu'il soit tort difficile de résister à la tentation d'en manger, en quelque façon qu'il soit présenté sur table, il est pourtant à propos de prévenir qu'en grain il est venteux et pesant sur l'estomac, et par cette raison que certains tempéraments doivent en manger avec modération.

Ses propriétés pour la médecine sont d'être amollissant, apéritif et résolutif : on emploie sa farine très communément dans les cataplasmes pour amollir, résoudre et disposer les tumeurs à suppurer. L'eau distillée des haricots verts, prise le matin à jeun au bain-marie, à la quantité de trois (91 gr) ou quatre onces (122 gr), est bonne contre la gravelle. On assure que le grain mâché, et appliqué sur la morsure des chevaux, guérit la blessure.

Il y a une infinité d'espèces de haricots. Un particulier de ma connaissance en a rassemblé par curiosité soixante-trois, toutes très distinctes en forme et en couleur, mais qui n'ont que fort peu de différence en goût et en qualité. Je n'entreprendrai point de les détailler, pour ne point m'écarter de mon objet, qui est de rendre mon ouvrage moins curieux qu'utile, et je m'en tiendrai à quinze ou seize reconnues pour les meilleures, et très suffisantes pour nos besoins. Ceux dont le climat et le terrain sont plus propres à quelques espèces, auront raison de les cultiver ; et je ne doute pas que certaines qui n'ont qu'une qualité médiocre ici, et qui, par cette raison, sont abandonnées, ne puissent être beaucoup meilleures dans d'autres pays : je me rappelle moi-même en avoir mangé avec plaisir, dans le Levant, de plusieurs sortes que je n'ai jamais vues en France. Les seize espèces dont je fais choix sont :

  1. le haricot gris
  2. le grivelé.
  3. le petit blanc nain hâtif.
  4. le plat blanc hâtif.
  5. le sans parchemin
  6. le blanc commun.
  7. le rognon de Caux.
  8. de Soissons.
  9. le petit rond blanc.
  10. le Suisse blanc.
  11. le Suisse gris.
  12. le Suisse rouge.
  13. de Prague.
  14. le gros à confire.
  15. de Hollande.
  16. le cardinal.
  17. d'Espagne [1]

Toutes ces espèces se multiplient de la graine ou du grain, qu'on met en terre à la fin d'avril dans les terres chaudes et légères, et à la mi-mai dans les fonds plus tardifs. Nulle plante n'est si délicate, et ne demande la terre si bien préparée et fumée en même temps : il faut qu'elle ait eu un bon labour avant l'hiver, un second à la fin de février, et un binage avant la semence. Ces trois façons se paient amplement par le produit, et j'ai l'expérience que ceux qui ménagent celle de février, perdent au lieu d'épargner. La terre doit être meuble aussi de sa nature, et bien amendée. Dans les fonds gras et humides, le grain est fort sujet à pourrir ; et s'il lève, la plante est toujours languissante, jaunit, et ne produit que peu. Cette plante a un avantage sur toutes les autres qu'il faut changer de place tous les ans ; mais celle-ci réussit mieux la seconde année dans la même terre, pourvu qu'on la secoure d'un peu de fumier ; le grain vient plus clair et plus uni.

C'est avec la houe [2] ou la binette qu'il faut semer les haricots, soit en plein champ, soit en planches ou en bordures ; et voici la manière, On retire d'abord deux houées de terre de la place qu'on lui destine, et on les jette sur a le côté, l'une à droite et l'autre à gauche. On donne ensuite plusieurs coups de cet outil tranchant pour ameublir la terre ; on en tire encore une bonne houée qu'on tient en l'air d'une main, pendant que de l'autre on répand la semence au fond de la petite fosse qu'on fait, et on rejette cette houée par dessus, qu'on égalise un peu d'un tour de main, de deux pieds en deux pieds (64 cm) ; on continue tant que le terrain a de longueur, et suivant l'espèce on met plus ou moins de grain. On recommence une seconde rangée quand la première est finie ; et on dispose les touffes en échiquier, à même distance de deux pieds. On a soin d'écraser les mottes, et d'ôter les pierres s'il s'en trouve.

Au bout de quinze jours la semence doit lever ; mais si, dans cet intervalle de temps, il survient des pluies d'orage qui battent la terre, le grain qui ne saurait percer la croûte qui se forme au-dessus, surtout quand il y succède quelques journées de chaleur, a besoin d'être secouru ; et il faut, avec quelque léger instrument, rompre cette croûte pour lui donner facilité de sortir, sans quoi il périt entre deux terres.

Un mois après, quand les pieds ont pris un peu de force, on les chausse, c'est-à-dire, on remet autour de la touffe la terre qu'on avait jetée sur le côté en le semant, et par cette façon la terre se trouve brisée en même temps ; c'est après une petite pluie que cet ouvrage est bon à faire.

Si on veut les ramer, c'est aussi le moment de piquer les rames, et ils produisent une fois plus.

Trois semaines après, ils sont ramés : on passe dans les rangs pour aider aux tiges, qu'on nomme filets, à s'accrocher aux rames.

Il y a des pays, tels que les environs de a Chartres, où on coupe les filets à mesure qu'ils se forment, et ils ne laissent pas d'avoir une abondance de grains : je crois cette méthode fort bonne quand on ne les rame pas ; car, toute la sève demeurant dans le pied, les premières fleurs tiennent toutes, le grain en est mieux nourri, et en coûte moins de frais et d'embarras. Tout au moins, quand les filets ont atteint le bout des rames, il faut les arrêter ; car ils font confusion, et consomment inutilement beaucoup de sève dont le bas profiterait.

S'il pousse beaucoup de mauvaises herbes, comme il arrive dans les années pluvieuses, il faut les sarcler à la main et avec adresse pour ne pas nuire aux plantes ; mais ordinairement la façon qu'on leur donne en les chaussant est la dernière.

On les cueille enfin en vert au mois de juillet, si on en a besoin. On doit se servir des deux mains, l'une qui tient la queue de la gousse, et l'autre qui la tire pour ne pas rompre les filets ; mais pour le mieux, il est à propos de destiner un canton exprès pour ceux qu'on veut manger de cette manière, sans toucher à ceux qu'on veut laisser sécher ; et à l'égard de ceux-ci, si ce sont des nains, il faut attendre que les plantes soient dépouillées de toutes leurs feuilles, et que les gousses soient sèches : on en fait des bottes, et on les enlève dans un temps sec. Mais si ce sont des haricots ramés, comme les gousses ne sèchent que les unes après les autres, il faut les cueillir à fur et à mesure ; sans quoi il arrive que celles du bas, qui sont les premières sèches, s'ouvrent en partie, et le grain tombe, ou bien il chancit et se rouille dans sa gousse, s'il arrive des temps pluvieux ; et c'est autant de gâté.

Si on a de la place pour les fermer sèchement, tant les uns que les autres, on fait mieux de ne les battre qu'au moment du besoin, car ils se conservent deux ans de plus ; et les blancs conservent mieux aussi leur blancheur et leur émail. Ce légume a le privilège qu'aucun insecte ne l'endommage comme les autres, ainsi on n'a rien à craindre lorsqu'ils sont battus sur-le-champ. Ils ne sont bons à semer que pendant deux ans au plus, car à la seconde il en manque une partie.

Pour avancer ce fruit et en jouir dès les premiers jours de juin, on le sème fort épais sur couche au commencement de mars. Il lève promptement, et on a grand soin de le couvrir dans les mauvais temps ; on le transplante ensuite à la fin d'avril au pied des murs du midi, où il reprend facilement en le mouillant un peu ; mais cela n'est bon à pratiquer que pour les nains hâtifs. La couche doit être chargée de six pouces (16 cm) de terreau.

Si vous voulez confire des haricots en vert pour l'hiver, choisissez les plus tendres, et jetez-les dans l'eau bouillante pendant un quart d'heure ; passez-les de-là dans une eau fraîche, enfilez-les ensuite avec du fil, mettez-les après à l'air pendant deux ou trois jours à l'ombre, et autant au soleil, ou, au défaut du soleil, faites les ressuyer sur des claies au four, en observant qu'il ne soit que tiède : se trouvant suffisamment ressuyés, retirez-les, enfermez-les sèchement dans des boîtes ou sacs de papier. Pour vous en servir faites-les revenir pendant vingt-quatre heures dans une eau tiède, dans laquelle vous saurez jeté un morceau de beurre manié, et faites-les cuire dans la même eau ; donnez-leur ensuite l'assaisonnement[1]t qu'il vous plaira, et vous a les trouverez aussi tendres que dans leur saison ; mais, à dire vrai, le goût en est bien changé.

Je viens à la description des espèces. Le haricot gris est une des premières qu'on sème dans les terrains hâtifs, et qui les premières fournissent Paris. Il ne s'élève point, ce qui est un avantage ; car on le place plus commodément partout, surtout au pied des murs pour l'avancer, sans qu'il nuise aux arbres. Sa fleur est purpurine, sa gousse fort longue et tendre, et son grain d'une bonne grosseur, fort allongé et arrondi, de couleur noire, jaspé de blanc. On n'en fait ordinairement usage qu'en vert ; cependant son grain est un des plus moelleux et des meilleurs qu'il y ait, il n'a contre lui que sa couleur qui déplaît, parce qu'il rend la sauce noirâtre ; cependant, avec l'attention de jeter l'eau quand il est à moitié cuit, et de la remplacer avec une eau bouillante, on corrige en partie ce défaut. Il rapporte beaucoup.

Le haricot grivelé n'a pas le grain si moelleux ; il est d'une espèce à peu près semblable pour la hâtiveté ; sa fleur est purpurine ; et sa gousse de grosseur médiocre, assez allongée, tendre et rayée de rouge. Son grain est gris de lin jaspé de noir ; il rapporte beaucoup quand il est ramé. On n'en fait communément usage, comme du précédent, qu'en vert, par la même raison que son grain rend la couleur de la sauce noire ; on peut pourtant la corriger de la même manière que nous l'avons dit ci-dessus.

Le haricot blanc nain hâtif donne son fruit en même temps que les deux précédents ; il ne file point, comme son nom l'annonce, et cependant il rapporte extraordinairement, surtout si on le cueille souvent. Sa fleur est blanche, et sa gousse longue et unie ; son grain est de même blanc, mais d'un blanc parfait, lisse et lustré ; il est menu, allongé et un peu arrondi. On le mange en vert et en sec, et il est fort bon de l'une et de l'autre façon : c'est de toutes les espèces celle qui donne le plus de plaisir et de profit dans un jardin bourgeois ; à cela près que le grain sec ne renfle par tant que les grosses espèces, dont je parlerai à la suite.

Le haricot blanc plat hâtif est encore, pour la hâtiveté, de la même classe que les précédemment ; il file et charge beaucoup quand il est ramé. Sa fleur est blanche et sa gousse de moyenne longueur ; son grain est de médiocre grosseur, court, aplati et assez blanc. On en fait usage en vert et en sec, mais, mangé en sec, on ne lui trouve pas la perfection de quelques autres.

Le haricot sans parchemin est le plus estimé pour être mangé en vert, par la raison que sa gousse n'a pas en dedans cette petite pellicule, qu'on nomme parchemin, commune à toutes les autres espèces, ce qui le rend plus tendre et plus agréable au manger. Il a encore l'avantage de donner son grain bien plus tôt qu'aucun autre ; il est passablement tendre et moelleux, et en même temps aussi hâtif que les précédents ; il fournit beaucoup étant ramé. Ses qualités lui méritent avec justice l'empressement de ceux qui le connaissent. Il a la fleur blanche, la gousse fort longue, le grain court, aplati, blanc et de moyenne grosseur. On en fait usage en vert et en grain tendre avec le même plaisir : en sec il l'a rien qui le distingue.

Le haricot blanc commun est celui qu'on trouve partout, et dont il se fait le plus d'usage dans les provinces où les espèces plus distinguées ne sont pas connues, et où peut-être elles ne réussiraient pas si bien qu'aux environs de Paris. Sa fleur est blanche, sa gousse médiocre, et son grain court, aplati, d'un blanc un peu sale ; il file et charge beaucoup quand il est ramé. On les mange également en vert, en grain tendre, et en sec.

Le rognon de Caux [3] est ainsi nommé, parce que son germe est enfoncé, et qu'en tout il a la ressemblance, pour la forme, d'un rognon de mouton ; c'est une très bonne espèces fort estimée et qui charge beaucoup étant ramée. Sa fleur est blanche, et sa gousse fort allongée , mais moins remplie que quelques autres ; son grain est un peu menu, allongé, et d'un blanc assez parfait, lisse et lustré. On le mange de toutes les façons, mais en sec c'est un des plus estimés, étant moelleux et tendre ; il succède aux premières espèces.

Le haricot de Soissons est celui qui tient le premier rang pour être mangé en sec ou en grain tendre, et qui cuit le mieux. Il charge beaucoup quand il est ramé ; mais il est sujet à tacher dans les années pluvieuses. Il faut être attentif à ramasser les gousses à mesure qu'elles sèchent. Sa fleur est blanche, sa gousse très longue, mais peu remplie; son grain fort aplati, d'un blanc et d'un émail supérieurs à tous les autres : c'est l'espèce la plus tardive. Il est aussi bon en vert que les autres, étant pris fort jeune ; mais on le réserve toujours pour manger en grain tendre ou en sec.

Le petit haricot rond, blanc, est la plus petite de toutes les espèces ordinaires, et la meilleure, au goût de bien des gens, pour être mangé en sec : il est tendre, moelleux ; il cuit parfaitement, ayant même quelque chose de distingué dans le goût. Il file, et charge prodigieusement quand il est ramé. Sa fleur est blanche, sa gousse petite, mais bien remplie ; son grain presque rond en tous sens, est d'un blanc un peu roux. On n'en fait usage qu'en sec, et il est de fort bon rapport.

Le haricot Suisse blanc est une espèce estimée à être mangée en vert ; il charge beaucoup, quoiqu'il soit nain. Sa fleur est blanche, à gousse fort tendre et longue ; son grain est moyenne grosseur, allongé, arrondi, d'un blanc roux, fort médiocre en qualité : il est assez hâtif, aussi n'en fait on guère usage qu'en vert.

Le Suisse gris n'a d'autre différence d'avec le premier que j'ai qualifié que la couleur de son grain, qui est d'un rouge noirâtre, marqueté de noir : il est nain comme le blanc, et' n'est destiné qu'à être consommé en vert.

Le rouge est de la même classe, à cela près que sa couleur est d'un plus beau rouge jaspée de plusieurs couleurs qui varient suivant les terrains.

Le haricot de Prague, autrement nommé le haricot à la Reine, parce que, dit-on Sa Majesté fut la première à qui il fut présenté il y a quelques années, est une espèce singulière, qui n'est cultivée que dans quelques jardins particuliers, et qui devrait être plus répandue. Sa fleur est purpurine, et sa gousse extrêmement petite, mais très remplie. Son grain n'a aucune forme décidée ; il s'en trouve de carrés et des ronds, d'autres disposés en pendeloques, les uns plus petits, les autres plus gros, mais tous plus menus que les plus petits pois : sa couleur est isabelle, jaspé de cannelle. On ne le mange ni en vert, ni en grain tendre, mais en sec : il a un goût fin et distingué qui le rend précieux à ses amateurs, particulièrement servi en salade à ; l'huile et au vinaigre. On le sème et on le cultive comme les autres espèces; il n'est ni plus délicat à élever, ni plus tardif à donner son fruit : on observera seulement qu'il faut nécessairement les ramer, si on veut en tirer un véritable profit ; dans cette disposition il rapporte une quantité incroyable de gousses et de grains, qui dédommage bien de la petitesse.

Le gros haricot à confire de Hollande, nommé en allemand schewert, qui signifie sabre, à la raison qu'il imite la forme d'un sabre, est une espèce extraordinaire par le volume de sa gousse qui porte sept à huit pouces de longueur, sur un bon pouce de largeur. Sa fleur est blanche, assez grande ; et son grain arrondi, blanc, gros et court. On le confit au sel pour l'hiver, et c'est presque la seule manière dont on l'emploie. Il en fait une consommation immense en Hollande et dans les pays voisins ; mais on ne le connaît presque pas en France.

Le haricot cardinal est une espèce nouvelle, dont je ne connais pas le pays originaire. Sa fleur est blanche, sa gousse assez longue, mais peu remplie, et son grain aplati et fort gros ; sa couleur est blanche dans toute la circonférence, et pourpre tout autour du germe, c'est ce qui le distingue le plus car il n'a rien particulier d'ailleurs, ni pour le goût, ni pour produit ; il a au contraire le défaut de mûrir tard et fort difficilement, ce qui fait qu'il porte peu, et quelquefois rien du tout.

Le haricot d'Espagne est une espèce singulière, qu'on cultive plus pour la fleur que pour le fruit ; cette fleur est semblable à celle des autres, mais d'une couleur de feu parfait, et il en produit abondamment pendant trois mois, pourvu qu'il soit ramé : il s'élève jusqu'à dix à douze pieds, s'il trouve à s'accrocher. À la fleur succède la gousse qui est fort longue, d'un gros vert, et rude sous le doigt. Le grain qu'elle renferme est double en grosseur de toutes les autres espèces. Sa couleur est gris de lin, jaspé de noir ; en plus grande partie. Il ne se mange pas d'ordinaire ; cependant on commence d'y prendre goût, et moi-même, l'ayant goûté, je ne l'ai pas trouvé différent des autres ; mais il pèche par la couleur comme le haricot gris et Suisse. Je ne fais mention des quatre espèces qui suivent, que pour en donner quelques-unes de pure volonté.

Le haricot de la Chine file comme les nôtres ; il a la feuille plus petite ; sa fleur est gris de lin dans les uns, et blanche dans les autres : elle sort des aisselles des feuilles en bouquets de dix à douze, disposée à peu près comme un rameau de giroflée, et il s'en forme jusqu'à vingt-cinq et trente sur chaque pied. La plus grande partie des fleurs donne du fruit, et communément il s'en trouve huit ou dix sur chaque grappe, qui sont conformées comme les gousses ordinaires, mais plus courtes, plus larges et plus renversées, avec cette différence de plus, les deux côtés sont hérissés de petites dents pointues en manière de scie, et que la peau est rude et raboteuse. La fève dans sa maturité est ronde et aplatie comme une lentille, mais deux fois plus grosse, et d'un noir parfait, liserée l'un filet blanc dans la moitié de sa circonférence. C'est par cette ressemblance de rondeur avec les pois, que quelques-uns l'appellent pois de la Chine ; mais la feuille, la tige et la gousse le caractérisent bien haricot. Il multiplie extraordinairement. J'ai compté sur un seul pied que j'avais élevé sur couche, jusqu'à deux cents et quelques gousses : en pleine terre il ne fournirait pas tant ; mais il fournit toujours beaucoup, pourvu qu'il ait été avancé sur couche, et replanté un pied de quelque mur bien exposé. J'en ai fait cuire une poignée pour en connaître le goût, je l'ai trouvé particulier : peut-être aurait-il des amateurs ; mais j'avoue que, quoiqu'il n'ait rien été mauvais, il ne m'a pas flatté. Sa couleur dans apprêt ne prévient pas ; peut-être dans son pays naturel a-t-il d'autres qualités qu'on ne lui trouve pas ici, ou des vertus que nous ne connaissons pas.

La première espèce de haricot du Mississippi se multiplie de graine comme les autres. Il faut la semer ici de bonne heure sur couche, et la replanter ensuite à une bonne exposition : elle porte une tige droite, ronde et lisse, de la grandeur d'une plume à écrire, qui s'élève à dix huit pouces ou deux pieds ; les feuilles sont distribuées partie à droite et partie à gauche, diamétralement opposées, à un pouce les unes des autres, placées en échelon de perroquet, et disposées en trois parties égales comme celles des haricots ordinaires, mais d'une forme tout à fait différente, n'ayant qu'un pouce environ de longueur, et formant un ovale parfait, lisses et unies sur les bords. Les tiges qui portent le fruit naissent des aisselles des feuilles dans le bas de la plante, au nombre de six ou huit, et portent douze à quinze pouces depuis leur naissance jusqu'aux premières siliques, qui sont ramassées en forme d'aigrette à l'extrémité. Les fleurs sont purpurines, formées à peu près comme toutes les fleurs du haricot, mais si petites, qu'à peines aperçoit-on leur forme. À ces fleurs succèdent des siliques ou gousses qui renferment la semence; ces siliques sont de la longueur du doigt, arrondies et menues comme de la petite ficelle : elles contiennent chacune quinze à dix-huit grains de couleur brune, conformés à peu près comme les petit haricot blanc rond, de la grosseur au plus d'un grain de millet. Par ce détail on jugera avec raison que ce grain n'est pas capable de servir l'aliment. On ne fait usage effectivement que de sa silique en vert, menue comme elle est ; il en faut une grande quantité pour en faire un plat, d'où il faut conclure qu'elle a apparemment un mérite que nous ne connaissons pas. J'ai cru d'abord que la plante venait plus forte au Mississippi qu'elle ne vient ici ; mais on m'a assuré qu'il y avait fort peu de différence, et que c'était un manger exquis pour ses habitants. Pour nous, nous ne pouvons guère considérer cette plante que comice une curiosité.

La seconde espèce du Mississippi est tout opposée à la précédente ; la tige est faible comme celle des haricots ordinaires, et file également ; la feuille est disposée de même, mais elle est plus grande, et les trois parties qui la composent sont régulièrement ovales, terminées en pointe. La fleur est aussi conformée de même, mais beaucoup plus grande, et de couleur de ose mêlée de blanc : la gousse qui y succède est extraordinairement longue et grosse, et renferme plusieurs fèves grosses, courtes, presque carrées, d'un blanc roux, ayant le germe noir. Je n'en connais pas le goût ; je l'ai vue seulement au Jardin du Roi, où elle a été apportée nouvellement : on peut assurer simplement que, elle se naturalisait dans notre climat, elle serait d'un grand rapport ; c'est ce qu'on saura sans doute plus certainement dans quelques années.

Le haricot d'Amérique est une espèce qui file comme les nôtres, mais dont la tige est fort déliée, et la feuille extrêmement petite : la fleur est proportionnée ; et la silique qui y succède n'a qu'un pouce environ de longueur, et ne contient qu'un ou deux grains presque ronds, de couleur café, et de la grosseur d'un grain de plomb à lièvre. A cette description, nul de ceux qui cultivent des haricots pour le profit et la multiplication, ne sera, je pense, tenté de faire des essais sur celui-ci.

Il y a encore plusieurs autres espèces de haricots à peu près semblables, que je passe sous silence, d'autant qu'elles n'intéressent que la curiosité, comme je l'ai déjà remarqué : ainsi je crois devoir terminer ici cet article.


[1] Voici le nom des principales variétés recherchées aujourd'hui : Haricot de Soissons ; Prédome ou Prodomet ; H. de Prague ; H. Sabre; H. Sophie; H. riz ; H. Flageolet ou nain hâtif de Laon ; H. nain de Soissons ; H. nain blanc sans parchemin ; H. Sabre nain ; H. nain blanc d'Amérique ; H. Suisse, soit blanc, soit gris, soit rougeâtre ; H. gris de Bagnolet ; H. ventre de biche ; H. noir ; H. rouge d'Orléans ; H. nain jaune du Canada ; etc. Le meilleur à confire est le Haricot gris de Bagnolet.

[2] Cet outil étant peu connu en beaucoup de pays et se trouvant néanmoins le plus commode que je connaisse pour la plupart des semences des grains, pois, fèves, haricots, blé de Turquie, etc. j'explique ici la manière de s'en servir pour ceux qui ne la connaissent pas, et qui voudront l'éprouver. J'expliquerai en même temps sa forme. Le fer porte treize (35 cm) à quatorze pouces (38 cm) de longueur, sur huit (22 cm) du côté de la douille, et sert à l'autre extrémité qui se trouve par-là carrée. Il doit être un peu recourbé dans son milieu, et tranchant à l'extrémité, qui doit être d'acier bien battu, de l'épaisseur d'une ligne (22 mm) ou une ligne et demie (33 mm) au plus ; à l'autre extrémité se place la douille, qui doit être coudée de manière que par sa disposition le manche revienne sur l'outil, et prenne le même tour. Ce manche doit être un peu courbe comme le fer, et ne doit s'en trouver écarté que de cinq (13,5 cm) à six pouces (16 cm) du côté de son tranchant, et de trois (8 cm) attenant la douille ; sa longueur est bonne à dix-huit pouces (48 cm). (Note de De Combles.)

[3] Rognon de Coq et non pas Rognon de Caux.

Fleuron

La culture maraîchère, par J. G. Moreau et J. J. Daverne, maraîchers parisiens, 1845

Plantes de la famille des légumineuses, de l’ordre et du genre dont elles portent le nom ; les espèces et les variétés sont nombreuses : les unes sont grandes, volubiles et ont besoin de tuteur ou d’échalas ; les autres sont naines et se soutiennent droites sans tuteur : toutes ont les feuilles ternées ou composées de trois folioles. Les fleurs, en grappes axillaires, sont très distinctes de toutes les autres fleurs de leur famille, en ce qu’elles ont la carène, les étamines et le style contournés en spirale. Le fruit est une cosse à deux valves, longue et étroite, qui contient plusieurs graines, la plupart réniformes. Les maraîchers de Paris ne cultivent que l’espèce suivante pour manger en vert.

Haricot flageolet

Culture forcée

Quelques-uns d’entre nous appellent ce haricot, nain de Hollande, nain de Laon, et tous conviennent que c’est le plus hâtif et le plus propre à être forcé. Dans la première huitaine de février, on fait une couche de printemps à pouvoir contenir un coffre à deux ou trois panneaux, dans lequel on étend un lit de terreau épais de 11 à 14 centimètres ; après quatre ou cinq jours, la plus grande chaleur est apaisée ; alors on égalise le terreau, on le plombe légèrement, on y sème le haricot assez dru, et on le recouvre de 15 millimètres de terreau ; après cette opération, on place les châssis et on les couvre de paillassons. Les haricots ne tardent pas à lever ; quand ils sont sortis du terreau, on leur rend la lumière dans le jour et on les recouvre la nuit.

Huit ou dix jours après que les haricots sont semés, il faut s’occuper de leur plantation, car ils poussent vite, et il ne faut pas attendre qu’ils soient grands pour les planter. On fait donc promptement, dans un endroit bien exposé, une ou successivement plusieurs tranchées, larges de 1 mètre 50 centimètres et profondes de 40 à 48 centimètres, dans chacune desquelles on établit une couche de l’épaisseur de 66 centimètres, sur laquelle on place des coffres dans lesquels on met 16 centimètres épais de terre bien divisée, tirée de la tranchée même que l’on a faite ou de celle que l’on ouvre à côté, et, lorsqu’elle est bien étendue dans les coffres, on place les panneaux : quand cette terre est suffisamment échauffée, on y plante les jeunes haricots à la main en les enfonçant jusqu’aux cotylédons, à raison de cinq rangs par panneau ; on en met deux dans chaque trou, à 27 millimètres l’un de l’autre, pour former touffe, et chaque touffe à 18 ou 20 centimètres l’une de l’autre dans les rangs. Aussitôt qu’on a planté un ou deux panneaux, on place les châssis et un paillasson par-dessus, et ainsi de suite jusqu’à la fin de la plantation. Quand les haricots sont repris, on ôte les paillassons dans le jour et on les remet la nuit, et on leur donne un peu d’air toutes les fois que le temps le permet ; pour cela, on a des cales en bois épaisses de 5 centimètres, larges de 8 centimètres et longues de 18 centimètres, et on les place à plat, de côté ou debout, sous le bord des panneaux, selon que l’on veut donner plus ou moins d’air aux haricots, ainsi qu’à toutes les plantes sous châssis.

Quand les haricots sont forts et qu’ils commencent à fleurir, il faut les visiter souvent, pour ôter les feuilles mortes ou qui jaunissent ; il faut même en ôter de vertes, pour donner de l’air aux plantes et que les rayons du soleil puissent les pénétrer, afin que la fleur ne coule pas et que les aiguilles (petits fruits) se forment ; lorsque ces fruits (petits haricots verts) sont longs de 6 à 7 centimètres, c’est le moment de les cueillir, et, comme ils se succèdent rapidement, on peut les cueillir tous les trois jours. Il peut arriver que la terre se dessèche, et les fruits couleraient si on n’arrosait pas de temps en temps ; un arrosoir d’eau par châssis est suffisant. Cette plantation bien conduite donne des haricots tendres pendant deux mois, et les mêmes couches étant retournées, on peut y planter une dernière saison de melon.

Haricot flageolet en pleine terre sous châssis

Culture

Dans la dernière quinzaine d’avril, on fait un bout de couche, on y place un coffre à deux ou trois panneaux, et on y sème le haricot comme il est dit ci-dessus ; quand il est bien levé, on laboure une ou plusieurs planches, larges chacune de 1 mètre 40 centimètres, à bonne exposition, et, quand la terre est bien hersée, bien divisée, on la couvre de 2 centimètres de terreau, et on y place des coffres, dans lesquels on plante les haricots comme nous l’avons dit, et on les recouvre de châssis sur lesquels on étend des paillassons le jour, jusqu’à ce que le plant soit repris ; ensuite on donne de l’air de plus en plus et on mouille en raison de la sécheresse. En cette saison, on enlève ordinairement les châssis avant que les haricots fleurissent : l’air les rend plus robustes, et ils fructifient abondamment jusqu’à la fin de juillet ; époque où les maraîchers cessent de cultiver le haricot parce qu’il en arrive beaucoup de la campagne sur les marchés, et qu’ils ne peuvent plus soutenir la concurrence.

Si on manquait de châssis pour faire cette dernière saison de haricots, on pourrait, après les avoir fait germer sur couche, les planter sous des cloches à 4 pieds par clochée ; dans de la terre préparée comme pour les châssis ; après les avoir ombrés pour les faire reprendre, ou leur donne de l’air en soulevant les cloches du côté du nord au moyen de crémaillères, et on n’attend pas que les cloches soient pleines pour déclocher, car les feuilles qui toucheraient le verre brûleraient.

Fleuron

Le jardin potager par Alexandre Ysabeau, médecin et agronome, né à Rouen, 1863

Le haricot, apporté des Indes en Europe à une époque à laquelle une date précise ne peut être assignée, a produit par la culture une grande variété d'espèces : on n'en compte pas aujourd'hui moins de 300. Toutes ont conservé le tempérament de l'espèce primitive; toutes périssent dès que la température descend seulement à un demi degré au-dessous de zéro. Le haricot, à quelque variété qu'il appartienne, ne peut donc être cultivé à l'air libre que depuis le moment où il ne gèle plus, jusqu'à celui où il ne gèle pas encore. Au point de vue de la culture, les haricots sont rangés dans deux divisions distinctes : celle des haricots à rames, et celle des haricots sans rames ou haricots nains.

Originairement, tous les haricots ont été à rames, c'est-à-dire que leurs longues tiges volubiles ont eu besoin d'appui, et se sont enroulées autour des tiges des plantes voisines : de là la nécessité de les ramer Quelques variétés, bas des en tiges, fleurissant de bonne heure ont perdu la faculté heure de croître avec abondance en hauteur : elles sont devenues les haricots nains.

Parmi les haricots à rames, le premier rang appartient au haricot blanc de Soissons, à très grandes rames ; viennent ensuite le haricot sabre, qui doit son nom à la forme particulière de ses longues cosses, et le haricot princesse, la meilleure des variétés nombreuses connues sous le nom de mange tout, parce qu'au moment où le grain est déjà parvenu à son volume normal, les cosses sont encore tendres et de très bon goût. Les deux premiers haricots sont principalement cultivés pour leur grain sec ; le troisième est consommé à l'état frais. Les jardiniers qui cultivent le haricot pour en vendre le grain sec font sagement de s'en tenir aux haricots blancs et d'exclure les haricots de couleur, lesquels sont particulièrement du domaine de la grande culture ; le haricot blanc sec se vend toujours plus avantageusement que le haricot de couleur. Il y a pour cela une raison bien connue des acheteurs : quand tous les haricots de la récolte annuelle n'ont pas pu être vendus dans l'année, et qu'on mélange les anciens avec les nouveaux, la cuisson de ce légume est inégale et difficile. Le mélange ne s'aperçoit pas aisément chez les haricots de couleur, les anciens ayant à peu près la même nuance que les nouveaux; il est au contraire très visible chez les haricots blancs : ceux de l'année précédente ont une teinte jaunâtre qui les fait reconnaître au milieu des haricots nouveaux, d'un blanc lustré ; il n'y a pas moyen de s'y tromper. Cette préférence du consommateur pour les haricots blancs comme légume sec doit engager le jardinier maraîcher à n'en pas cultiver d'autres, quand leurs produits ne doivent pas être vendus à l'état frais.

Le haricot demande une terre plutôt légère que forte ; il craint également les deux extrêmes de la sécheresse et de l'humidité. On sème, sous le climat de Paris, du 10 au 15 mai ; c'est l'époque la plus favorable quand le grain doit être récolté complètement mûr. Si l'on se propose de récolter seulement des haricots verts et des haricots en grains à écosser frais, les semis peuvent être continués de quinze en quinze jours jusqu'en juillet. On plante habituellement le haricot en poquets, par touffes de cinq ou sept, selon le volume que doivent acquérir les plantes. La terre, labourée et fumée comme pour toute autre culture jardinière, est sillonnée de raies peu profondes, tracées avec la binette le long d'un cordeau, les unes dans le sens de la longueur des planches du potager, les autres en travers; les points de rencontre de ces lignes marquent la place des touffes de haricots. La distance est de 50 centimètres pour les grandes espèces de haricots à rames, et de 40 seulement pour les haricots nains. On ouvre avec la houe un trou de 5 à 6 centimètres de profondeur ; on jette cinq ou sept haricots dans chaque trou, en ayant soin qu'ils ne se touchent pas réciproquement. Si l'on peut disposer d'une bonne provision de cendres de bois tamisées, il est bon d'en jeter une poignée sur les haricots avant de les recouvrir de terre ; aucun amendement ne produit un effet plus direct que les cendres de bois ou même de tourbe sur la végétation des haricots. On peut, quand on a semé par un temps favorable, la terre n'étant ni trop sèche ni trop humide, planter les rames au moment même des semis. Dans les pays de plaine souvent balayés par des vents violents, on incline les rames sur deux rangs, les unes vers les autres, et on les rattache deux par deux à 1 décimètre de leur sommet, ce qui leur donne beaucoup de solidité. Il faut apporter beaucoup d'attention à l'état de la terre au moment où l'on sème les haricots ; si elle est trop sèche, le haricot subit en terre une demi-germination qui, faute d'humidité, ne peut se compléter ; il languit et ne donne jamais des plantes vigoureuses; si elle est trop humide et que la température ne soit pas assez douce, il pourrit et ne lève pas. La levée des haricots est assez souvent contrariée par la croûte qui se forme à la surface du sol à la suite de fortes pluies survenues après les semis ; on doit sans tarder briser cette croûte avec précaution, en se servant des dents d'une très petite binette, sans quoi la levée des haricots serait manquée. Les haricots nains sans rames, les meilleurs pour la culture maraîchère, sont le hâtif de Hollande et le flageolet de Paris. Le premier l'emporte quant à la précocité; le second, quant à la fécondité. On peut semer toutes les espèces de haricots nains, soit en poquets, comme les haricots à rames, soit en lignes continues ; cette dernière disposition est préférable dans les terrains frais, partout où le climat est sujet à des pluies fréquentes : il s'établit dans ce cas entre les lignes de haricots des courants d'air qui favorisent la prompte évaporation de l'humidité superflue. Sous un climat sec, il vaut mieux semer en poquets ; les touffes, formant un ombrage épais, conservent mieux la fraîcheur du sol. Quand le terrain est très humide et le climat très pluvieux, deux circonstances peu favorables à la culture du haricot, on peut, en se conformant d'ailleurs aux indications qui précèdent, ne point enterrer les haricots des semis et les déposer seulement aux distances, convenables sur le sol bien ratissé. On rassemble sous forme d'une petite éminence la terre sur les haricots, qui lèvent alors beaucoup mieux que s'ils avaient été enterrés.

En Belgique, on pratique pour les semis de haricots une méthode particulière qui peut être suivie avec avantage dans tous nos départements au nord de la Seine. Le sol, convenablement labouré et fumé, est égalisé au râteau ; puis on y creuse aux distances voulues, selon l'espèce de haricots qu'on se proposé d'y semer, des trous ou poquets dans lesquels on ne sème rien. On amène dans le sentier qui sépare les planches du potager un tonneau posé sur une brouette et rempli de purin ou jus de fumier, mêlé d'engrais humain délayé, mélange connu des cultivateurs du Nord sous le nom d'engrais flamand. On verse dans chaque trou environ un demi-litre de cet engrais, après quoi les trous sont comblés et le sol est ratissé, comme si les poquets n'y avaient pas été creusés. Quinze jours plus tard, à la place qui correspond à cette fumure d'engrais liquide, on pose les haricots sur le sol sans les enterrer, et l'on ramène un peu de terre par-dessus en forme de butte pour les recouvrir. Leurs racines, rencontrant en terre la fumure donnée à leur intention, en profitent complètement, et les haricots poussent avec une vigueur exceptionnelle.

Quand les haricots sont bien levés, on leur donne un premier binage, suivi d un second quinze jours plus tard ; ils ne tardent pas à couvrir tout le terrain, ce qui prévient le développement ultérieur de la mauvaise herbe. Pour gagner du temps et obtenir des haricots verts de bonne heure à l'air libre, on sème sur couche tiède, sous châssis, des haricots nains hâtifs, qu'on transplante en place dès que la température extérieure le permet, et qui reçoivent ensuite les mêmes soins de culture que ceux de même espèce semés en place. Il ne faut récolter les haricots verts ou en grains qu'avec précaution, soit pour ne pas déraciner les plantes, soit pour éviter de faire tomber les fleurs, qui adhèrent peu à leur pédoncule. Les haricots à rames cultivés comme légume sec doivent être récoltés à trois ou quatre reprises, à mesure qu'une partie des cosses arrive à maturité ; sans cette précaution une grande partie des haricots mûrs les premiers se gâterait dans les cosses et serait perdue. On conserve dans les cosses les haricots destinés à être semés l'année suivante ; ils sont écossés seulement au moment de les semer.Contrairement aux règles de rigueur à l'égard des autres plantes cultivées, le haricot peut être semé plusieurs années de suite à la même place sans qu'on remarque une diminution notable dans ses produits, soit en quantité, soit en qualité, et sans porter atteinte d'une manière appréciable à la fertilité du sol

CULTURE DES PORTE-GRAINES.

Pour conserver franches et exemptes d'altération les meilleures espèces de haricots, il faut d'abord isoler ceux qu'on plante pour servir de porte-graines, c'est-à-dire les éloigner des haricots d'autres espèces qui fleurissent à la même époque, et qui pourraient donner lieu à des croisements accidentels; c'est par l'effet de ces croisements que, quand on est assuré de n'avoir semé que du haricot blanc nain, on en récolte de bigarrés de diverses couleurs, qui grimpent comme des haricots de Soissons. À mesure que les cosses arrivent à maturité, on les récolte pour les conserver entières ; les haricots ne doivent être écossés qu'au moment de la plantation ; les cosses qui mûrissent les premières sont toujours celles qui fournissent les haricots les plus parfaits de chaque variété. Ce soin est surtout nécessaire pour conserver dans leur pureté les haricots flageolets nains hâtifs ; la précocité, qui fait leur principal mérite, ne peut être conservée que quand on sème les haricots provenant des fleurs épanouies les premières, et dont les cosses mûrissent souvent près d'un mois avant les autres. On insiste sur ce point, parce qu'il arrive assez souvent que le jardinier peu expérimenté s'étonne de la dégénérescence de ses haricots précoces dès la seconde génération ; il n'y a pas dégénérescence dans le vrai sens du mot ; il y a seulement omission du soin indispensable qu'on vient d'indiquer.

Fleuron

Manuel pratique de culture maraîchère par Courtois-Gérard, marchand grainetier, horticulteur, Paris, 1863

Synonymies vulgaires, Pois long, Pois de mai, Pois de mer ; anglaise, FrenchBean, KidneyBean ; allemande, Bohnen.

Plante herbacée, annuelle, originaire de l'Inde, et introduite dans la culture en 1579.

Dans les marais de Paris, les Haricots ne sont cultivés qu'à l'état de primeurs ; car, à l'époque où ils donnent en pleine terre, les cultivateurs des environs de Paris en apportent une quantité si considérable, que cette culture ne présenterait aucun avantage aux maraîchers. La seule variété cultivée comme primeur est le Haricot nain de Hollande. Vers le 15 janvier, on le sème sur couche et sous panneaux, et, aussitôt après le développement des cotylédons, on le repique en pépinière, toujours sur couche et sous panneaux. Bien que ce repiquage ne soit pas pratiqué par tous les maraîchers, nous conseillons néanmoins de ne pas le négliger, car les Haricots qui ont été repiqués viennent moins haut et produisent davantage. Dans la seconde quinzaine de janvier, on prépare une couche d'environ 50 centimètres d'épaisseur, dont la chaleur soit de 20 à 25 degrés ; on pose les coffres dessus, puis on la charge de 12 à 15 centimètres de terre légère ; après quoi on relève le plant pour le planter sur la couche de la manière suivante :

On trace quatre rangs par coffre, le premier à 40 centimètres du haut du coffre et les autres à une distance égale entre eux, et l'on plante les Haricots à 15 centimètres de distance sur la ligne, de manière qu'il s'en trouve deux par rang de vitres. Pendant la nuit, on couvre les panneaux avec des paillassons ; on donne de l'air toutes les fois que la température le permet, surtout à l'époque de la floraison. Il faut aussi, à cette époque, si la température est sèche, bassiner légèrement, afin d'empêcher les fleurs de couler ; puis on remanie les réchauds de temps à autre, afin d'entre tenir dans la couche la chaleur nécessaire. On visite souvent les Haricots, on supprime toutes les grandes feuilles, et l'on a soin d'enlever tout ce qui pourrait donner de l'humidité, chose la plus redoutable à ce genre de culture.

Lorsque les plantes ont environ 25 centimètres de hauteur, on les incline sur le haut du coffre, et on les maintient dans cette position au moyen de petites tringles de bois qu'on pose sur les tiges. Pour faciliter cette opération, ces tringles ne doivent pas excéder 1,33 m de longueur, c'est-à-dire la largeur d'un panneau. Peu de jours après, l'extrémité des tiges se relève (on peut alors enlever les tringles), mais la partie inférieure reste couchée sur le sol. Indépendamment de ce que nous venons d'indiquer, il faut encore exhausser les coffres toutes les fois que le besoin l'exige et recharger chaque fois les sentiers, afin de concentrer la chaleur sous les panneaux. On commence ordinairement à cueillir les premiers Haricots ainsi traités dans la seconde quinzaine de mars, c'est-à-dire environ six semaines après le semis.

Après avoir cueilli des Haricots pendant quelque temps, on peut laisser grossir les autres pour les récolter en grains ; c'est ainsi que quelques maraîchers récoltent des Haricots en grains dès la seconde quinzaine d'avril ; pour cela il suffit de remanier les réchauds afin de ranimer la chaleur de la couche, de ne pas donner d'air et d'arroser abondamment.

On peut faire avec avantage l'application du chauffage par le thermosiphon à la culture des Haricots sous panneaux ; alors on peut semer dès la fin de novembre ; mais, comme à cette époque il y a souvent absence complète de soleil, ce qui est très défavorable à ce genre de culture, il est préférable de ne commence cette opération que dans la seconde quinzaine de décembre, lorsque le plant est bon à repiquer. On prépare une couche très mince, dans le seul but de garantir les Haricots de l'humidité du sol ; puis on fait circuler les tuyaux de l'appareil au-dessus de la couche ; on entretient une chaleur de 15 à 20 degrés sous les panneaux, et, comme l'on peut régler ce chauffage à volonté, on les enlève tous les jours sans avoir égard à l'état de la température, et l'on donne de l'air aussi souvent qu'il est nécessaire, ce qui contribue puissamment au succès de l'opération. Aussi, avec ce mode de culture, on commence à cueillir les premiers Haricots dans la première quinzaine de février. On cultive les Haricots sur couche, comme nous l'avons indiqué, jusqu'à la fin de mars. En avril, on sème encore sur couche, mais on repique en pleine terre et sous cloche. On repique trois Haricots sous chaque cloche ; au bout de quelques jours on commence à donner de l'air, puis on enlève les cloches, lorsque les gelées ne sont plus à craindre et que la température est favorable. Il va sans dire qu'on peut indifféremment employer des cloches ou des panneaux[1].

Semis de pleine terre

On cultive des Haricots dans presque toutes les communes qui environnent Paris, mais particulièrement à Croissy, à Montreuil et à Fontenay-aux-Roses ; les variétés le plus généralement cultivées sont: le Haricot hâtif de Laon, ou flageolet ; celui de Soissons nain au gros pied ; le Haricot de Massy, ou quatre à la touffe ; le Haricot suisse, gris, dit Bagnolet.

On les sème en mai ; en terre légère, le semis s'opère dans la première quinzaine du mois ; mais en terre argileuse, forte, dans la seconde seulement, par touffes, ou mieux en rayons, car par ce moyen on obtient une végétation beaucoup plus vigoureuse, et par conséquent des produits plus abondants. On trace des rayons de 5 centimètres de profondeur, à 40 centimètres de distance les uns des autres ; après quoi on sème les Haricots un à un, à 16 ou 20 centimètres sur la ligne ; puis on les couvre d'environ 2 centimètres de terre.

Pour semer par touffe, on fait des trous de 5 à 6 centimètres de profondeur, disposés en échiquier, à 40 centimètres les uns des autres ; on dépose cinq ou six Haricots dans chacun, puis on les recouvre de la même quantité de terre que ceux semés en rayons. Il faut environ deux litres de semences par are. Quelque temps après on donne un binage pour faciliter la levée des graines ; mais ce n'est que lorsque les Haricots sont bien levés qu'on finit de remplir les trous ou les rayons. A partir de l'époque ci-dessus désignée, on peut semer en pleine terre jusqu'à la mi-août les Haricots destinés à être mangés verts ; mais, quand on veut récolter des Haricots secs, il ne faut pas semer après le 15 juin.

Les Haricots à rames, connus sous les noms de Haricot de Soissons, Haricot-Sabre, Haricot de Prague, Haricot-Beurre, Haricot-Prédomme, doivent être semés en mai, comme les Haricots nains. Dans le midi de la France, on sème du maïs entre les lignes de Haricots, pour leur servir de rames ; partout ailleurs, on emploie des perches de chêne, de hêtre ou de sapin, que l'on place après le premier binage. Pour résister aux vents qui ébranlent souvent les rames des haricots, on peut les réunir par deux ou par quatre et les fixer avec de l'osier ; mais le plus simple, quand on habite un pays où le vent souffle avec violence, est encore de semer des Haricots nains.


[1] C'est souvent à tort que l'on détruit les Haricots aussitôt après qu'on en a récolté les premiers produits ; car, en les nettoyant avec soin, opération qui se borne à enlever les feuilles mortes et les fruits que l'on a trouvés trop petits pour être cueillis, on obtient au bout de quelque temps une seconde récolte aussi abondante que la première.

Fleuron

Le petit jardin potager par Maurice Rivoire, grainetier à Lyon, 1869

On peut semer les haricots nains dès mars dans un endroit abrité, mais en avril, en plein champ ; on continue jusqu'à la fin de juillet. On met les grains dans une raie de 8 à 10 centimètres de profondeur tout au plus ; on recouvre légèrement les grains qui n'aiment pas à être chargés de terre. On bine lorsqu'ils sont levés, et on butte les jeunes plants de manière à ce qu'ils se trouvent au centre des ados. Les lignes doivent être espacées de 30 à 50 centimètres. Les meilleures variétés sont : 1 ° le Noir hâtif de Belgique ; 2° le Bagnolet, le Gris de tous les jours ; 3° le Beurre noir nain ; 4° le Cent pour un et celui d'Aix, très productif; 5° enfin le Gourmand nain, extra bon. Le principal mérite du premier est de ne pas craindre l'humidité; il faut l'employer de préférence pour les premiers et les derniers semis. Le deuxième (Gris) est très rustique, très fertile, et peut être cultivé avec avantage pendant toute la belle saison. Si on veut récolter les grains pour l'hiver, il faut semer la Comtesse de Chambord, très fertile et très bonne variété lorsqu'elle est semée en mai.

Les haricots à rames se sèment en planche à environ 20 centimètres de distance. Après la germination, on bine et on plante des branches pour les faire grimper. Les meilleures variétés sont : le Soisson, le Haricot d'Alger ou Beurre, le Coco blanc, le Sophie, etc.

Fleuron

Guide pratique du jardinier français de Philippe Desmoulins, horticulteur région parisienne, 1881

Le haricot (Papilionacées) est originaire de l'Inde ; il ne réclame pas autant de soins que le Pois. Il lui faut une terre douce, légère, un peu fraîche, bien fumée avec un engrais consommé; vous y sèmerez par touffes les espè-ces hâtives vers le 20 avril : cinq ou six grains par trou; vous donnerez deux binages en rechaussant légèrement nu second. Il faut attendre, pour les autres espèces, la première quinzaine de mai ; juin et juillet pour les suisse et, en particulier, pour le nain hâtif de Hollande et le flageolet, préférés par les maraîchers des environs de Paris.

Si votre terre est argileuse et compacte, augmentez la quantité d'engrais, retardez vos semis; recouvrez peu la graine. Dans les terres fortes, préférez au semis en touffes, le semis en ligne, grain par grain à environ 8 cm de distance, avec entre-lignes de 30 cm à 40 cm. Mêlez à la terre des cendres de bois, de tourbe ou de houille, en petite quantité.

Les semis de haricots verts se continuent pendant juillet et même jusqu'à la mi-août ; si vous faites ces derniers sur plates-bandes, bien abritées quand l'année n'est pas trop sèche, ces produits tardifs ne mûriront pas avant l'arrivée des gelées, mais comme haricots verts ou comme haricots écossés frais, ils vous dédommageront amplement de vos peines.

À l'aide des châssis, du fumier et des réchauds, on peut avoir des haricots verts nouveaux pendant une grande partie de l'hiver et pendant tout le printemps, en semant sur couche chaude ; on repique le plant tout jeune sur des couches moins chaudes, par touffes de trois ou quatre plantes, à intervalles de 30 cm ; il faut aérer de temps en temps et surtout à l'époque de là floraison ; essuyer la vapeur qui s'attache au vitrage ; enfin arroser abondamment. La variété préférée, dans ce cas, est le haricot nain de Hollande qui donne ses produits après deux mois et demi à trois mois du culture; il ne faut ni le coucher ni l'étêter.

Citons comme nouveautés : Le Bicolore d'Italie sans parchemin. Le H. jaune hâtif de six semaines ; le H. Valentin nain hâtif sans parchemin.

Le Haricot d'Espagne est une plante d'ornement connue par ses belles grappes de fleurs d'un rouge écarlate ; on arrache sa racine de la forme et de la grosseur d'un navet, pour la conserver à la cave dans du sable frais et la replanter en mars; il fleurit et donne indéfiniment des graines.

Fleuron

Le potager moderne, par Gressent, professeur de la Sorbonne, d'arboriculture et d'horticulture, jardin-fruitier école dans le Val d'Oise, 1895

La culture des haricots a une grande importance dans le potager ; cette culture doit donner des haricots verts pendant presque toute l’année ; des haricots en grains frais et des mange-tout le plus longtemps possible, et enfin la provision de haricots secs pour l’hiver.

La culture des haricots comprend quatre divisions bien distinctes :

1. celle des haricots verts ;

2. des haricots à consommer en grains frais ;

3. des haricots à consommer avec les cosses (les mange-tout) ;

4. des haricots à manger en sec pendant l’hiver.

Commençons par la culture des haricots verts, la plus utile aux propriétaires, comme aux personnes retirant un produit de leurs jardins.

Haricots verts (nains)

Les meilleures variétés à cultiver, classées par ordre de précocité, sont :

Haricot nain flageolet d’Étampes. – Le plus précoce de tous, excellent et très productif. Semer sous châssis en janvier et février, en pots dans l’orangerie ou en serre tempérée, pour mettre en pleine terre ensuite en février et mars, et en pleine terre à partir d’avril, à une place abritée, et dans le carré C du potager, de la fin d’avril à la fin d’août.

Haricot nain flageolet hâtif à feuilles gaufrées. – Des plus précoces, très bon, d’une fertilité prodigieuse donnant des haricots verts, bien faits et d’une belle nuance. C’est peut-être le plus productif de tous. Semer sous châssis, en pots et en pleine terre, aux mêmes époques que le précédent.

Haricot nain Bagnolet gris. – Excellente variété, des plus productives, bonne de qualité et la plus répandue aux environs de Paris pour faire des haricots verts. A semer en pots, dans la serre ou l’orangerie, en février et mars, et en pleine terre d’avril à juillet. C’est une des meilleures variétés à cultiver en pleine terre.

Haricot nain Bagnolet gris. – merveille de Paris Plus nain que le précédent et ayant les mêmes qualités, le grain de même couleur un peu noirâtre panachée, mais moins large, d’une grande fécondité. Mêmes époques de semis.

Haricot nain noir de Belgique. – Variété des plus rustiques, excellente pour châssis, en ce que les tiges ne sont pas élevées, mais un peu moins productive que les précédentes. En outre, cette variété, moins sensible au froid que les autres, est précieuse pour les premiers semis de pleine terre, souvent détruits parles gelées tardives. Semer sous châssis de janvier à mars en pots, dans la serre ou l’orangerie en février et mars, et en pleine terre en avril, rai et juin.

Haricot nain flageolet jaune. – Excellente variété très hâtive et des plus productives, pour la pleine terre. Convient surtout aux potagers du rentier, de la ferme et du petit cultivateur. Semer en pleine terre vers le 18 avril.

Haricot nain jaune cent pour un. – Ayant les mêmes qualités que le précédent, très rustique et très productif. Même emploi et même époque de semis.

Le haricot aime une terre douce, fraîche, pas trop compacte ni trop humide ; il redoute les fumures neuves, sur lesquelles il pousse en feuilles, sans former de grains ; la cendre le fait fructifier abondamment. Sa place est marquée dans le carré C du potager. La culture du haricot n’est pas difficile ; mais tous les ouvrages d’horticulture ont tant répété qu’elle était facile, que la plupart du temps on croit inutile de lui donner les soins indispensables, et l’on obtient de pitoyables résultats, quand toutefois on ne manque pas tout à fait de haricots. On obtient assez facilement des haricots verts, sur couches et sous châssis, pendant une grande partie de l’hiver. Le point capital est d’éviter l’humidité, qui les fait pourrir. On obvie à cet inconvénient en donnant de l’air le plus souvent possible, et en entretenant les vitres des châssis constamment claires afin d’y laisser pénétrer une lumière vive, et en enlevant la buée avec le plus grand soin aussitôt qu’elle se forme.

Les haricots flageolets d’Étampes, flageolets à feuilles gaufrées, et noirs de Belgique, sont les variétés convenant le mieux à la culture sous châssis. On peut semer depuis le mois de décembre jusqu’au mois de mars sur couche chaude et, dès que les premières feuilles sont formées, on repique en pépinière sur une couche un peu moins chaude, entre d’autres plantes, pour mettre en place sur une couche qui leur est spécialement consacrée, trois semaines plus tard. Le repiquage en pépinière a une assez grande importance ; les haricots repiqués deux fois, toutes choses égales d’ailleurs, poussent moins de feuilles, fructifient plus vite et plus abondamment que ceux qui ont été semés en place. Deux repiquages sont nécessaires pour la culture sous châssis, pour obtenir des résultats sérieux.

Une couche susceptible de donner de 15 à 18 degrés de chaleur est suffisante pour mettre en place des haricots destinés à produire des haricots verts. Lorsque la température s’abaisse, on ranime les réchauds, et l’on augmente le nombre des paillassons, pour garantir du froid pendant la nuit ; on place quatre lignes de haricots sous les châssis de 1,30 m ; ces lignes sont à 20 centimètres du bord, et à 30 centimètres d’intervalle entre elles ; on les trace en rayons, et on repique les haricots en quinconce sur les lignes, à une distance de 10 centimètres environ.

On donne de l’air toutes les fois que la température le permet, c’est chose importante pour éviter l’humidité. Dans ce but encore, on supprime toutes les feuilles trop développées, comme celles qui jaunissent et sont atteintes par la pourriture : on arrose légèrement, avec beaucoup de précaution, toujours dans le jour, et avant de donner de l’air, pour laisser à l’humidité surabondante le temps de s’évaporer, et il faut toujours avoir le soin d’essuyer les vitres en dedans, avant de les refermer, pour enlever la buée, afin d’éviter la pourriture.

On récolte les haricots verts au fur et à mesure qu’ils se forment, et vers la fin de la récolte on contre-plante avec des choux-fleurs.

Quand on recouvre une couche destinée à mettre des haricots verts en place, il est urgent d’augmenter l’épaisseur de la couverture de terreau, et d’y ajouter plus de terre, deux tiers environ.

L’épaisseur doit être de 24 à 25 centimètres, pour que les racines ne la dépassent pas ; quand la couverture de la couche est trop mince, les racines pénètrent dans le fumier ; alors les haricots poussent en feuilles et ne produisent pas. Il est très difficile, pour ne pas dire impossible, de les maîtriser. Le plus simple,en ce cas, est de les arracher et de recommencer. Quand on ne tient pas à avoir de grandes primeurs, il est facile d’obtenir des haricots verts assez précoces, sans grande peine. On sème vers le 40 février, sur couche chaude usée, c’est-à-dire faite depuis longtemps, et ayant donné la plus grande partie de sa chaleur. On repique sur couche tiède, pour mettre ensuite en place sur couche sourde du 25 mars au 10 avril. On peut encore semer sur couche tiède en mars, repiquer sur couche sourde et mettre en place en pleine terre, dans un endroit abrité, vers les premiers jours de mai. Enfin, si l’on est pauvre en couches et mal monté en châssis, on peut encore obtenir des haricots verts très précoces en les semant en février et mars, dans des pots que l’on suspend dans l’orangerie, ou mieux encore dans une serre tempérée, pour les repiquer dans d’autres pots en avril, et les mettre en place en pleine terre, en mai. Partout où l’on possède quelques châssis, une serre, une orangerie, une serre à légumes, et même une resserre éclairée où il ne gèle pas, il est facile avec très peu de peine, et de la bonne volonté, d’obtenir du plant excellent, qui avance considérablement la récolte, comparativement aux semis de pleine terre.

Les haricots étant très sensibles à la gelée, on ne peut guère les semer en pleine terre avant la seconde quinzaine d’avril, ou, si l’on sème plus tôt, il faut le faire en planches, et les abriter pendant les nuits froides avec des paillassons. J’ai dit que le haricot aimait une terre fraîche, mais exempte d’humidité surabondante. En conséquence, nous ferons les semis de pleine terre de la manière suivante pour tous les haricots nains.

Dans les sols argileux, humides, peu favorables à la culture des haricots, nous adopterons une culture toute spéciale : on tracera au cordeau, et avec la grande lame du rayonneur, des sillons profonds de 8 à 10 centimètres et distants de 30 centimètres entre eux ; on sèmera au fond de ces sillons un haricot tous les 10 centimètres environ, et l’on recouvrira de 2 centimètres de terre seulement ; lorsque le haricot est enterré très profondément, il pourrit et ne germe pas. Dès que les haricots ont quatre feuilles, on donne, par un temps sec, et dans le milieu de la journée, un binage énergique par lequel on unit le soi et l’on remplit entièrement les sillons. Les haricots ainsi rechaussés acquièrent plus de vigueur et sont plus productifs. On sème les haricots dans le carré C du potager, qui a été cendré en plein. Quand on est riche en cendres, on peut garder l’excédent de cendres, et l’employer partiellement pour les semis de haricots et de pois. Lorsqu’on n’en a pas assez pour cendrer tout le carré, on cendre partiellement ces deux cultures. On cendre partiellement quand on a trop ou pas assez de cendres ; on augmente toujours ainsi beaucoup la récolte. Lorsque les haricots ou les pois sont semés et recouverts, on répand la cendre dont on dispose tout le long des sillons ou autour des poquets et on la laisse sur la terre jusqu’au premier binage par lequel on l’enfouit. Il faut bien se garder de répandre la cendre avant de semer, et de mettre la graine en contact avec elle ; sa causticité empêcherait la germination. Je ne saurais également assez recommander de ne biner les haricots que par un temps sec et dans le milieu de la journée, quand toute trace de rosée a disparu, parce qu’un binage, donné lorsque les feuilles sont mouillées par la pluie ou la rosée, dé- termine la rouille, et la récolte est sensiblement diminuée, quand elle n’est pas tout à fait compromise Je recommande exclusivement les semis en lignes dans les sols humides, parce qu’ils permettent à l’air de circuler entre les lignes, et que les haricots sont moins exposés à pourrir. L’expérience, du reste, a sur- abondamment prouvé que les semis en lignes produisaient le double de ceux en poquets, dans les sols humides. Ajoutons que le cendrage doit être d’autant plus abondant que le sol est plus argileux.

Dans les sols de consistance moyenne et légers, au contraire, on sème les haricots en poquets profonds de 8 à 10 centimètres, et placés en quinconce à 30 centimètres en tous sens. Je dis à trente centimètres en tout sens, et non à 50 ou 60, comme on le fait presque partout. On fait les touffes plus ou moins fortes suivant la consistance du sol. Pour les variétés à cultiver pour haricots verts, on met de cinq à six haricots dans un sol de consistance moyenne ; de sept à neuf et même dix, dans les sols siliceux. Le but principal est de couvrir toute la surface de la planche avec les feuilles, afin d’empêcher la terre de se dessécher. Le semis en poquets se fait comme celui en lignes : on recouvre les graines de 2 centimètres de terre seulement ; on cendre par dessus, quand on a un excédent de cendres ou que le carré n’a pas été cendré, et l’on bine pour rechausser, comme dans les semis en lignes lorsque les haricots ont quatre feuilles.

J’ai dit de faire des poquets profonds de huit à dix centimètres. La profondeur des poquets, chose des plus difficiles à obtenir des praticiens, à une grande importance ; il n’y à qu’un outil pour les faire convenablement : la grande serfouette. L’angle du manche, comme la longueur de la lame, permettent de faire très vite des poquets profonds et d’ameublir le fond, chose impossible avec la binette.

Les haricots semés au fond d’un poquet de 8 à 10 centimètres de profondeur, et couverts de 2 centimètres de terre, sont abrités naturellement par le poquet, en cas de gelée blanche. En outre, la tige du haricot porte à la naissance des cotylédons un bourrelet qui émet très facilement des racines, ce qui a toujours lieu quand ce bourrelet est enterré au premier binage, par lequel on unit le sol. Les haricots traités ainsi sont d’une grande vigueur et produisent beaucoup plus que ceux semés à plat avec la binette, et qui ne peuvent être rechaussés, parce qu’ils n’ont pas été semés assez profondément.

Un second et quelquefois un troisième binage est nécessaire pour les haricots nains, surtout si on les arrose, soin indispensable si le temps est sec à l’époque du semis, pour assurer la levée, et au moment où les haricots se forment, afin de les faire grossir et de les récolter tendres.

Quand on cultive des haricots pour la production des haricots verts, il faut cueillir au fur et à mesure de la formation, cueillir quand même tous les deux ou trois jours au plus, quitte à les vendre où à les donner s’il y en a trop, mais ne jamais laisser de grains se former. Cela détruit la récolte de haricots verts, tout en donnant un pitoyable produit en grains. De deux choses l’une : on fait des planches pour récolter en vert ou en grains, l’un ou l’autre, mais jamais l’un et l’autre sous peine de voir le produit s’amoindrir de plus de deux tiers. Les planches destinées à la production des haricots verts veulent être constamment cueillies ; plus on cueille, plus on récolte. Celles, au contraire, destinées à la production des grains, frais ou secs, doivent rester intactes. Les premières cosses formées sont les plus vigoureuses ; leur produit est assuré. Si on les enlève, celles qui viennent ensuite ne produisent que des grains peu nombreux, chétifs et mal nourris.

En opérant comme je viens de l’indiquer, nous aurons des haricots verts de février à octobre. Les derniers semis de flageolets d’Étampes et à feuilles gaufrées, faits à la fin d’août et en septembre, nous donneront d’excellents haricots en novembre, décembre et même janvier.

Il suffira, pour obtenir ce résultat, de poser des coffres et des châssis sur les planches. À l’approche des gelées on entourera les coffres d’un réchaud pour y maintenir la chaleur ; on donnera de l’air quand la température le permettra, et l’on couvrira soigneusement pendant la nuit.

Nous aurons des haricots verts pendant onze mois de l’année, mais à la condition de suivre mes indications à la lettre, de mettre de l’ordre dans nos cultures et de cultiver spécialement chaque variété de haricots pour ce qu’elle doit donner : des haricots verts, en grains frais, en cosse et en sec pour l’hiver.

Haricots en grains frais

Haricot nain flageolet de Paris. – Qualité hors ligne pour cet usage, très productif, rustique, et de plus pouvant se semer avec succès de février à septembre. C’est presque le seul haricot à cultiver pour consommer en grains frais, par sa qualité hors ligne : aucune autre variété ne l’égale en saveur ni ne peut le remplacer.

Depuis quelques années, on cultive pour le marché le haricot chevrier auquel on a fait les réclames les plus tapageuses. Ce haricot est plus vert que le Flageolet de Paris, ce qui explique sa vogue auprès des marchands et des cuisinières, mais il est loin d’en avoir la qualité.

Haricot nain de Chine. – Très productif, excellent, pouvant être employé en grains frais, mais ne valant pas cependant le flageolet de Paris. Semer en pleine terre en mai et juin.

Haricots mange-tout

Haricot nain (mange-tout) beurre noir. – Pour consommer avec les. cosses, hâtif, très productif et bon de qualité. Semer en mai.

Haricot nain (mange-tout) beurre blanc. – Un peu moins productif que le précédent, plus délicat, mais de qualité hors ligne. Semer en mai.

Haricot à rames (mange-tout) beurre noir d’Alger. – Excellent et très fertile, pour manger avec Les cosses ; c’est la variété la plus rustique et aussi la plus cultivée. Semer en mai.

Haricot à rames (mange-tout) beurre blanc. – Vigoureux, productif et plus fin que le précédent ; excellent pour consommer avec les cosses, et parfois en grains secs. Semer à la même époque.

Haricot à rames (mange-tout) Prédomme (friolet de Caen). – Rustique, fertile et réussissant mieux que les autres variétés dans les terres un peu consistantes, et sous les climats froids. Très précieux pour le Nord, l’Est et l’Ouest. De qualité supérieure ; c’est peut-être le meilleur de tous les haricots mange-tout, pour consommer les cosses ; de plus, il est excellent en grains secs. À cultiver partout et dans tous les potagers. Semer en mai.

Haricot à rames (mange-tout) princesse. – Même qualité que le précédent. Excellent pour les contrées froides ; un peu plus hâtif que le haricot Prédomme. Très bon avec les cosses et en grains secs. Semer en mai.

On obtient facilement les haricots en grains verts en semant en pleine terre, d’avril à septembre les flageolets de Paris. En semant tard, on ne risque jamais que quelques poignées de haricots, la terre dans laquelle on les sème ayant payé largement sa rente par les récoltes précédentes. On est bien récompensé d’un peu de peine quand le produit réussit, et nous pouvons ajouter qu’il arrivera toujours à bonne fin toutes les fois qu’on garantira Les haricots des premières gelées avec des paillassons, au besoin avec des châssis simplement posés sur les planches. Les châssis et les cloches ne servent plus pour les couches à la fin de l’année ; pourquoi ne pas les employer à prolonger la récolte des haricots, laitues, chicorées, fraises, etc., quand on n’a qu’à les poser dessus ?

Si nous voulons prendre la peine d’ajouter un réchaud aux châssis, nous récolterons des haricots en grains frais jusqu’en novembre et même décembre.

En semant des flageolets de Paris, sous châssis ou en pots, dans l’orangerie, la serre ou la serre à légumes, en février et mars, pour les repiquer en pleine terre quand les gelées ne sont plus à craindre, nous avancerons la récolte des haricots en grains frais de deux mois.

Le flageolet de Paris est la seule variété à employer pour les semis très précoces et très tardifs, comme peur ceux de saison. Il réussit à toutes les époques.

Il faut bien se garder de cueillir des haricots verts sur les semis destinés à produire des haricots en grains frais. C’est en détruire la récolte, Les premières cosses formées sont les plus abondantes en grains, comme les plus précoces.

Quand on les cueille en vert, plus de la moitié de la récolte est détruite, et le reste ne mûrit que très tard.

On sème le flageolet de Paris et le nain de Chine en poquets, comme je l’ai indiqué pour les haricots verts, et on met de sept à dix grains, suivant que les touffes doivent être plus ou moins fournies, selon la qualité du sol.

Les haricots beurre nains, noirs et blancs se sèment en poquets comme les précédents : sept grains par poquet. Les haricots beurre noirs et blancs à rames, les Prédomme et les princesse se sèment en poquets,distants de 40 centimètres en tous sens, cinq grains par poquets. Les poquets sont remplis et le sol nivelé par le premier binage, quand les haricots ont quatre feuilles. Aussitôt qu’ils montrent les premiers filets, on donne un binage très profond avec la grande serfouette (la binette ne pénètre pas assez profondément), et l’on rame aussitôt après. Il est urgent que ce second binage soit très profond pour bien ameublir le sol, c’est le dernier : il n’est plus possible de biner une fois les rames posées. C’est pourquoi je recommande la grande serfouette pour l’opérer, parce qu’elle seule peut pénétrer assez profondément, pour bien ameublir le sol, et détruire radicalement les mauvaises herbes.

Haricots nains pour grains secs

Haricot nain de Chine Nankin. – Très productif, de qualité supérieure, ayant une saveur toute particulière et des plus agréables. Bon aussi en grains frais. Semer en mai et juin.

Haricot nain Bonnemain. – Très rustique et des plus productifs, malgré sa tendance à filer. Bonne variété à cultiver dans le potager de la ferme et du petit cultivateur. Semer dans la seconde quinzaine d’avril.

Haricot nain princesse. – Très productif et de qualité remarquable. Semer en mai.

Haricot nain de Soissons. – Blanc, productif, très : bon, mais. redoutant les sols humides, où il pourrit. Semer en mai.

Haricot nain flageolet rouge. – Le plus beau comme le meilleur des haricots rouges. Très productif. Semer en mai.

Haricots à rames pour grains secs

Haricot à rames (à écosser) de Soissons. – Blanc, très gros grain, d’excellente qualité, très fertile. Cette variété forme le fond de toutes les plantations de haricots à manger en sec, autant pour son produit que pour sa qualité. Semer en mai.

Haricot à rames (à écosser) sabre. – Blanc, grain moins gros que le précédent, très grand, exigeant de très hautes rames, mais des plus fertiles et de qualité hors ligne. La peau est mince comme une pelure d’oignon. Semer en mai.

Les haricots beurre blanc, Prédomme et princesse à rames sont excellents en grains secs. (Voir ci-dessus aux haricots mange-tout.)

La culture des variétés de haricots nains que je viens d’énumérer se fera dans le carré C, en poquets : distants de 35 centimètres ; on sèmera sept grains par poquet, et on donnera tous Les soins indiqués pour les haricots en grains frais et en verts.

Les haricots à rames seront également : semés dans le carré C du potager, en poquets distants de 40 centimètres. On, sèmera par poquet trois à quatre pour les Soissons ; et trois seulement pour les sabre, On unira le sol en faisant le premier binage aussitôt que les haricots auront quatre feuilles, et, dès que lès filets seront visibles, on donnera le second binage à la serfouette, et on ramera aussitôt après.

J’insiste pour faire donner le second binage et ramer aussitôt que les filets sont visibles, c’est-à-dire avant qu’ils ne s’allongent. Quand on attend trop tard, les filets rampent sur le sol ; on en coupe une partie en binant, et le reste s’accroche difficilement après les rames. C’est la moitié au moins de la récolte de perdue pour avoir négligé de faire le binage, et de planter les rames en temps utile. Le temps perdu en culture ne se rattrape jamais.

Quand, au contraire, on a ramé à temps, les filets prennent aussitôt dans les rames ; ils montent avec rapidité, s’attachent immédiatement aux rames, acquièrent une grande vigueur, et le produit est double au-moins de ce qu’il eût été s’ils avaient souffert. Il n’y à pas de prétexte pour retarder l’apposition des rames, quand on à besoin d’une certaine quantité de haricots secs.

Il est bien entendu que l’on ne cueillera jamais de haricots verts sur ceux destinés à être mangés en grains secs. C’est perdre volontairement plus de la moitié de la récolte, et cela aussi bien sur les haricots nains que sur ceux à rames.

Il faut bien se garder de prendre des haricots au hasard quand on veut en garder pour semer. Pour récolter de la graine, et conserver à la fois les variétés très pures et très fertiles, il est urgent de faire un semis spécial pour graines dans le carré D. Aussitôt les siliques formées, on conserve Les plus longues, les plus belles, et l’on supprime toutes les autres.

Lorsque la semence est épurée ainsi, triée à la main, on peut compter non seulement sur une récolte très abondante, mais encore sur une pureté de variété que l’on ne rencontre pas toujours dans le commerce.

Fleuron

Le Jardin potager, par L.-J. Troncet, 1910

Le haricot est l'une des plantes les plus importantes au point de vue de l'alimentation. Ce sont les graines qu'on utilise dans les variétés à écosser ou à parchemin. Dans les variétés mange-tout, le fruit entier sert à la consommation.

Culture

Lorsqu'on cultive le haricot en pleine terre il faut, autant que possible, lui réserver un sol substantiel et léger, modérément humide, situé à bonne exposition. On le sème lorsque les gelées ne sont plus à redouter, généralement en mai pour le climat de Paris. Le semis est souvent pratiqué en rayons éloignés de 40 à 45 centimètres et profonds de 5 centimètres. On fait des trous espacés de 15 à 20 centimètres sur une même ligne.

Haricots.

On met un haricot dans chacun, puis on referme les sillons et l'on donne au besoin un léger bassinage. Si l'on sème en touffes, on place quatre ou cinq graines par trou. Lorsque les plants ont poussé quelques feuilles, on pratique un binage; plus tard on sarcle et on arrose. Certains horticulteurs buttent les jeunes plants ; cette opération paraît être d'un heureux effet sur la végétation.

On fait d'ordinaire plusieurs semis pendant une année, ce qui permet de récolter jusqu'en octobre. Lorsqu'on cultive des haricots mange-tout, le développement de ceux-ci réclamant un temps plus court, on peut les semer plus tard que les autres. Les haricots dits à rames, au contraire, doivent être semés au commencement de la saison.

Quand les tiges des haricots à rames ont atteint une hauteur de 30 à 35 centimètres, il est nécessaire de les ramer, c'est-à-dire de leur fournir des tuteurs ou rames afin de les soutenir dans leur croissance. Ces tuteurs peuvent être des baguettes ou même de simples roseaux. Les haricots nains ont sur les haricots à rames l'avantage de se soutenir d'eux-mêmes pendant toute la durée de leur développement. Lorsqu'on juge que les gousses des haricots mange tout ont atteint une grosseur suffisante, il faut les cueillir aussitôt, car si l'on attendait qu'elles aient acquis un plus grand développement, elles seraient moins tendres et les fils de leurs cosses nuiraient à leur qualité. Les graines des haricots qu'on veut manger à l'état frais sont cueillies un peu avant l'entière maturité. Dans ce cas, on peut récolter tous les deux ou trois jours. Comme le haricot est très sensible à la gelée, les semis tardifs doivent être abrités du froid.

Quoiqu'on puisse manger constamment le haricot sec, on a cependant jugé utile de forcer ce légume. Les semis sont alors effectués vers la mi-janvier, sur couche chaude. On les abrite par des châssis qui, pendant le développement, sont soulevés toutes les fois qu'on le peut ; on a soin d'enlever aux plants les feuilles qui seraient en mauvais état. On n'emploie, bien entendu, pour la culture forcée, que les variétés naines, les autres ne pouvant restreindre leur développement de manière à n'occuper que la place réservée sous un châssis. On préfère ordinairement le haricot nain de Hollande ; sous un même coffre on trace quatre rayons éloignés de 15 centimètres. Pendant la croissance, on arrose de temps en temps ; la nuit on dépose des paillassons sur les panneaux. Dans le courant d'avril, on peut avoir des haricots frais à cueillir. Si l'on a pratiqué plusieurs semis successifs on en récoltera jusqu'à ce que les produits de la culture naturelle viennent remplacer ceux de la culture forcée.

Haricots.

Variétés

Nous grouperons les variétés de haricots en haricots à rames et en haricots nains. Dans ces deux catégories nous parlerons successivement des haricots à écosser et des haricots sans parchemin.

Les meilleures variétés de haricots ramants à écosser sont : Le haricot de Soissons, qui se mange surtout à l'état sec; il est très répandu aux environs de Paris ; Le haricot de Liancourt, rustique et productif; c'est une variété fort appréciée; Le haricot riz, dont le grain, très petit, est de bonne qualité ; Le haricot sabre à rames, un peu tardif, mais en revanche très productif; sa tige peut atteindre 3 mètres de hauteur, sa cosse très grande renferme un grain blanc de première qualité.

Les races les plus recommandables de haricots ramants sans parchemin sont :

Le haricot prédome, l'un de nos meilleurs haricots, tant à l'état vert qu'à maturité complète ;

Le haricot princesse, rustique, assez hâtif et relativement productif ;

Le haricot intestin, race productive assez estimée ;

Le haricot d'Alger ou haricot beurre, à grain noir, très productif et fort apprécié comme mange-tout ;

Le haricot beurre ivoire, surtout cultivé comme mange-tout, mais dont les grains sont néanmoins très bons ;

Le haricot blanc géant, vigoureux et productif; sa graine est blanche, tandis que sa cosse est verte ;

Le haricot de la Val d'Isère, tardif mais productif, à grain noir ;

Le haricot zébré, généralement assez estimé.

Parmi les haricots nains à écosser, nous citerons :

Le haricot nain hâtif de Hollande, qu'on cultive habituellement sur couche ;

Le haricot flageolet blanc, l'une des plus estimées de nos variétés naines ;

Le haricot flageolet très hâtif d’Étampes, race précoce de qualité égale à la précédente, sur laquelle elle a l'avantage de la précocité ;

Le haricot flageolet à feuille gaufrée, qu'on cultive surtout sous châssis ;

Le haricot noir de Belgique, hâtif, qu'on soumet à la culture forcée pour le manger vert ;

Le haricot de Bagnolet, qu'on mange aussi lorsqu'il est vert ;

Le haricot Saint-Esprit ou à la religieuse ; le grain présente une tache dont la forme peut à la rigueur rappeler celle d'un oiseau ; généralement on veut y voir une colombe.

Nous mentionnerons parmi les haricots nains sans parchemin:

Le haricot jaune du Canada, l'un des plus recommandables ;

Le haricot jaune de la Chine, aujourd'hui très répandu en France ;

Le haricot d'Alger nain noir, précoce et productif ;

Le haricot Émile, très hâtif et très délicat comme mange-tout ; il convient bien à la culture forcée.

Gilbert Cardon, cours 2014

À planter en mai.

Gilbert fait ses haricot en godets par poquet de 3 → repiquage par 3 en motte pas à racines nues. On peut faire les poquets 1 mois avant les dernières gelées (10 mai).

Pas trop arroser le terreau. Gilbert plante ses haricots dans le terreau tel qu'il sort du sac sans arroser, dès qu'ils sortent il arrose.

Il faut les récolter sans arrêt car sinon la plante arrête de faire des fleurs.

Haricots et maïs

Le maïs doit faire 40 cm avant de planter les haricots. Pour faire cette association il vaut mieux prendre des haricots 1/2 rame comme les tarbais.

Haricots Orteil du prêcheur

Orteil du prêcheur le meilleur et le plus gros des haricots, monte à 3 m et a des gousses de 30 à 40 cm.

C'est le seul haricot vivace, si l'hiver est doux. Il fait de grosses racines et peut repartir du pied. On arrache pas le pied on laisse les gousses sèches sur place et on les cueille au fur et à mesure des besoins. Ce n'est pas un mange-tout, on ne mange que les graines.

On peut le planter au pied d'un arbre (basse tige car les haricots on besoin de beaucoup de lumière) → il monte dans l'arbre.

Fleuron